Tout d’abord, il serait bon de rappeler ce qu’est un fonds flexible. En effet, cette terminologie a un sens à géométrie variable puisque parfois elle couvre également les fonds dits patrimoniaux. Un fonds flexible est un fonds dont la composition varie de façon tactique aussi bien en fonction de la nature des actifs qui le composent que de leurs poids respectif dans le fonds. La finalité du recours à ces fonds est de laisser à la discrétion du gérant le choix de l’allocation optimale en fonction des perspectives de marché : le gérant pourra donc par exemple faire évoluer sa poche action  entre 0 et 100%, réduisant son exposition dans les phases baissières. Inversement, il pourra faire remonter son allocation en actions lors de phases haussières des indices. L’univers d’investissement s’est fortement diversifié ces dernières années et il est de plus en plus commun de trouver en plus du classique couple actions/obligations d’autres actifs liquides (matières premières, métaux précieux, devises). Le recours à des produits dérivés permet également une plus grande réactivité car ils donnent la possibilité de conserver la composition du fonds (atout majeur dans des périodes de crise où il est difficile de liquider certaines positions) en couvrant l’exposition directionnelle (par exemple à travers l’utilisation d’options sur indice).

Ces fonds ont un énorme succès en France. En effet l’érosion des rendements des fonds en euro oblige les investisseurs à trouver des solutions alternatives qui combinent à la fois rendement/sécurité et faible volatilité.

Cet engouement pour ce type de fonds semble une spécificité française puisque la proportion de ces fonds dans les portefeuilles suivis par un conseiller en gestion de patrimoine indépendant représentent entre 20 et 30%, chiffre qui varie en fonction du profil du risque du client. A titre de comparaison au Royaume-Uni ce chiffre ne dépasse pas les 9%.

La société Quantalys qui répertorie les fonds qui font le plus l’objet de consultation par les professionnels sur son site, mentionnait pas moins de 7 fonds flexibles dans les 10 plus consultés en septembre 2016.

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source Quantalys

Cela tient certainement au fait que pour un conseiller en gestion de patrimoine l’allocation d’actifs est un exercice compliqué et chronophage et qu’il peut sembler plus opportun de choisir une solution clef en main en donnant carte blanche au gérant.

Pour autant les performances sont-elles au rendez-vous ? Une étude récente de la société Morningstar est riche d’enseignement. Tout d’abord et cela peut paraître surprenant pour des fonds dits actifs, on note que ces fonds sont très corrélés à la performance du CAC 40, la diversification n’est pas forcément une réalité.

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source Morningstar

La valeur ajoutée de ces fonds est d’autant plus discutable que sur les 10 dernières années, ce type de fonds a fait moins bien qu’un indice composé à 50% d’actions et 50% d’obligations. La volatilité de ces fonds est aussi apparue en moyenne plus élevée que celle de l’indice de référence.

Les gérants professionnels ne semblent pas en mesure de trouver le « market timing » idéal, ce que les sportifs appellent le « money time », le moment où l’on marque le point gagnant. Avec une volatilité à court terme relativement élevée et beaucoup de mini-crises, le gérant se retrouve très souvent dans une position défensive ce qui lui permet d’offrir des performances correctes dans des marchés baissiers mais plus modestes lorsque les voyants repassent au vert.

 

Dès lors se pose la question du recours à ce type de fonds lors de la construction d’un portefeuille financier ?

Il y a bien sur des fonds qui ont su démontrer de réelles capacités à surperformer les indices mais cela reste des exceptions.

En effet une des plus grosses critiques à ce type de fonds est le manque de visibilité sur l’exposition totale d’un portefeuille à telle ou telle classe d’actifs sachant que le gérant peut à n’importe quel moment faire évoluer sa composition.  Comment appréhender le niveau de risque/volatilité global du portefeuille ?

La construction d’un portefeuille diversifié qui correspond à un profil de risque identifié et à la réalisation d’objectifs pour l’investisseur doit se faire avec des choix assumés sur tel ou tel type de classe d’actifs.  Ne serait-il pas plus opportun de choisir les meilleurs dans chaque classe d’actifs une fois la structure du portefeuille établie : la plupart des études modernes montrent qu’entre 60 et 90% des performances proviennent de l’allocation d’actifs stratégique.