Depuis une quinzaine d’années, les épargnants se voient proposer des fonds d’investissement nouvelle génération aux appellations diverses et variées type « fonds à formule », « fonds à garantie partielle en capital », « produit structuré ». Tous ces fonds ont vocation à rassurer les investisseurs en proposant une rémunération fixe sous conditions.
Sont-ils incontournables et destinés à tous les investisseurs ?
Tout d’abord il faut rappeler le contenu de ces fonds d’investissement.
Les fonds d’investissements structurés, souvent proposés au sein des contrats d’assurance-vie mais aussi aux guichets des banques, permettent d’investir sur plusieurs types d’actifs : indices boursiers (indices grand public ou indices propriétaires des émetteurs), indices obligataires, indices matières premières, taux de change mais aussi sur des actions individuelles (en général des actions phares qui composent les indices).
Ces fonds présentent la particularité d’avoir une durée de vie de « consommation » limitée :
- Ils sont lancés pendant une période limitée de commercialisation (1 à 3 mois)
- La durée de vie de l’investissement est en général pour les produits grand public de 10 à 12 ans maximum mais on verra que dans la pratique ces fonds sont clôturés plus rapidement (scénario favorable).
Le principal avantage de ces fonds, et c’est ce qui est souvent mis en avant pas leurs promoteurs, est de proposer en général une garantie en capital plus ou moins partielle (par exemple à concurrence d’une baisse de 30 à 50% des marchés boursiers). A l’issue de la durée de vie du fonds vous avez donc une probabilité forte de retrouver 100% de votre capital.
En contrepartie de cette protection partielle du capital, vous ne bénéficierez également que d’une participation partielle à la croissance de la valeur du sous-jacent. Cette rémunération est contractualisée et conditionnée à certains évènements qui sont constatés à une fréquence déterminée lors du lancement du fonds (journalière, hebdomadaire, trimestrielle ou annuelle). On compare par exemple la valeur de votre investissement à sa valeur de lancement ou bien pour un indice obligataire le nombre de défauts pendant la période.
Quels sont les pièges de ces investissements ?
Tout d’abord, ces fonds sont émis par des contreparties bancaires dont il faut s’assurer de la solidité : si la banque qui a émis le fonds venait à faire défaut, votre produit perdrait toute valeur.
Ensuite, la valorisation « au fil de l’eau » de ces fonds est opaque car elle nécessite d’avoir accès à des outils financiers et mathématiques sophistiqués auxquels les particuliers n’ont pas accès : le professionnel mixera taux d’intérêts et volatilité en ayant recours à des produits dérivés (principalement des options). Cette opacité est d’autant plus importante que seule la personne qui construit le produit peut valoriser le fonds. Ses modèles sont-ils assez solides ? On a ainsi vu nombre d’équipes de gestion de produits dérivés pris à contrepied par les taux d’intérêts négatifs, scénario qui n’avait pas été intégré dans leur modèle.
Le sous-jacent ou indice qui sert à calculer la performance est également un critère crucial à prendre en compte lors de sa décision d’investissement : bien souvent des indices dits « synthétiques » sont utilisés à la place des indices classiques (CAC 40, Eurostoxx 50, S&P 500). La raison est qu’ils offrent en général des perspectives de valorisation moindre.
Autre point de vigilance : le point d’entrée dans le fonds. Le timing auquel le fonds va valoriser son lancement a une très grande influence sur la probabilité de gagner de l’argent. Prenons l’exemple de quelqu’un qui aurait investi le 31 janvier 2020, le CAC 40 clôturant à 5.806. Ce niveau initial va être utilisé pendant toute la durée de l’investissement pour calculer la performance du fonds. Pour un produit classique d’ « autocall » (rappel anticipé), il ne se passera rien pendant 10 ans si à aucun moment lors de la constatation contractuelle, l’indice n’est pas supérieur ou égal à 5.806.
Mais surtout le plus gros écueil de ces fonds est de comprendre et d’évaluer les risques et la performance probable de l’investissement : est-ce que l’investisseur est conscient de la « digitalité » de la protection de son capital en cas de baisse (pas de pertes jusqu’à par exemple 50% de la baisse de l’indice mais 100% de la perte au-delà !) ? Est-ce que l’investisseur est conscient que la fréquence des constations des conditions de la performance influe sur la probabilité d’être gagnant ? Est-ce que l’investisseur est conscient que sa garantie du capital n’est acquise qu’au terme de l’investissement et que s’il devait récupérer ses fonds entre temps, il s’expose à une perte en capital ?
Soucieuse de ces risques, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a souhaité réguler au fil du temps la commercialisation de ces produits mais elle constate toujours une compréhension limitée des scénarios probables de l’investissement (https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/publications/rapports-etudes-et-analyses/levolution-de-la-complexite-des-produits-structures-commercialises-en-france-quel-bilan-de-laction).
Même s’il peut avantageusement compléter une allocation financière, le recours à des fonds structurés requiert d’être bien accompagné(e) afin de s’assurer qu’ils soient en complète adéquation avec son profil d’investisseur et correspondent à l’objectif visé.