La semaine dernière les députés en deuxième lecture ont adopté le projet de loi Sapin II. Ce texte prévoit de restreindre les facultés de rachat des parts de fonds euro de contrat d’assurance-vie lors de circonstances qualifiées d’exceptionnelles. Il donne aussi la possibilité au Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) de fixer le montant des provisions sur bénéfice des fonds euro, en d’autres termes leur rémunération.
Beaucoup de voix se sont émues de l’immiscion du pouvoir exécutif dans un contrat de droit privé soulignant que les dispositifs actuels permettaient déjà à l’autorité de contrôle des compagnies d’assurance, l’ACPR, d’intervenir afin de surseoir aux possibilités de rachat de contrats d’une compagnie en situation délicate.
On peut aussi légitimement se poser la question de l’opportunité d’une telle décision au regard des mesures que les compagnies d’assurance ont mis en place ces dernières années afin d’absorber un risque de remontée rapide des taux et de demandes de rachat disproportionnées. La dernière étude de l’ACPR sur la santé des compagnies d’assurance publiée cet été a encore mis en valeur le niveau record des provisions sur bénéfice. Ajouté à une rentabilité des actifs relativement stable au-dessus de 3% depuis 4 ans, la marge de manoeuvre des assureurs n’est peut-être pas aussi ténue que l’on veut bien nous faire croire.
Quoiqu’il en soit le législateur a prévu un arsenal de mesures qui devrait permettre de faire face à un risque « systémique » type faillite Lehman avec une graduation des restrictions aussi bien dans leurs montants que dans leurs durées (3 mois maximum, renouvelable une fois). Par ailleurs, grâce à l’intervention de l’AFER (Association Française d’Epargne et de Retraite), des aménagements ont été prévus afin que les rachats motivés par une nécessité absolue (type rachats programmés en faveur de retraités) bénéficient d’un régime d’exception.
Même si aujourd’hui le déclenchement d’un tel mécanisme ne semble pas d’actualité, que peut-on recommander à un investisseur soucieux de conserver une épargne liquide et mobilisable à tout instant ? La solution que semblent préconiser de concert les assureurs est le transfert sur des unités de compte les sommes actuellement investies en fonds euro. Au-delà de la question de la pertinence d’une telle opération par rapport au profil du risque du client, on peut imaginer que ces actifs par essence plus risqués puissent être liquidés dans de très mauvaises conditions de marché (le fameux risque systémique) et forceraient les investisseurs à réaliser des moins-values définitives sur leurs contrats d’assurance.
La solution semble plutôt à chercher au-delà de nos frontières. En effet l’enveloppe assurance-vie est accessible à l’épargnant français dans d’autres pays de l’Union européenne. On pense surtout au Luxembourg pour lequel les compagnies d’assurance développent depuis quelques années une offre assez semblable à celle que l’on trouve en France avec toutefois un ticket d’entrée relativement élevé. La fiscalité applicable est bien entendu celle française pour un résident fiscal français mais atout majeur, ces contrats sont régulés par le Grand-Duché qui ne prévoit pas de telles limitations au rachat des parts en fonds euro.
On voit donc qu’au bout du compte cette décision risque d’aboutir à une décollecte en France sur les gros contrats et donc une inégalité de traitement entre les épargnants français.
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