La détermination de la résidence fiscale en France souffre d’une forte complexité : le domicile fiscal est la constatation d’une situation de fait et non de choix administratif, il s’agit dans chaque cas d’étudier attentivement les éléments que pourrait retenir l’administration fiscale.

Tout d’abord, il est à rappeler qu’il n’existe aucune obligation de prévenir l’administration lors d’un départ à l’étranger hormis pour les contribuables soumis à l’exit tax et ceux originaires d’Alsace-Moselle ! Dans la pratique, une notification est rendue souvent nécessaire afin de communiquer ses nouvelles coordonnées à l’administration fiscale française.

Il faut aussi rappeler que lors de l’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d’une personne physique, l’administration fiscale peut réclamer une justification sur les avoirs détenus à l’étranger sans au préalable avoir établi que la personne était résidente fiscale en France (https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000032260317 ).

Les règles de droit interne permettent d’établir le lieu de résidence fiscale, l’article 4B du Code Général des Impôts donnant une liste de critères à respecter (critères OCDE) :

Sont ainsi considérées comme fiscalement domiciliées en France :

 – les personnes qui ont sur le territoire français leur foyer ou le lieu de leur séjour principal,

– celles qui y exercent une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles n’établissent que cette activité est exercée en France à titre accessoire,

– celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques,

– les agents de l’État exerçant leurs fonctions ou chargés de mission dans un pays où ils ne sont pas soumis à un impôt personnel sur l’ensemble de leurs revenus.

 

Bien entendu, la règle de droit internationale prévalant sur la loi interne en vertu de l’article 55 de la Constitution, l’existence d’une convention fiscale destinée à éviter les doubles impositions écarterait la loi fiscale française.

Le Bulletin Officiel des Finances Publiques détaille plus longuement les critères d’appréciation de la domiciliation (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/1911-PGP), et plusieurs éléments clefs sont à retenir :

  • Foyer en France => Est considérée comme domiciliée en France une personne qui est amenée à séjourner temporairement hors de France (même pendant la plus grande partie de l’année) en raison des nécessités de sa profession, dès lors que la famille continue normalement d’habiter en France. Le lieu de séjour principal est réputé être en France lorsqu’une personne y séjourne à titre principal quelles que soient les conditions de ce séjour et le lieu de séjour de sa famille. C’est le cas d’une personne qui séjourne plus de 183 jours en France au cours d’une année civile (pas année de départ) ou qui séjourne plus longtemps en France que dans n’importe quel autre pays.

 

  • Critère d’ordre professionnel => Pour les salariés, le domicile est fonction du lieu où ils exercent effectivement et régulièrement leur activité professionnelle. Pour les mandataires sociaux d’une société dont le siège social ou le siège de direction effective est situé en France, cette situation implique, en principe, l’exercice en France du mandat social. Pour les titulaires de mandats sociaux au sein de plusieurs sociétés dont les sièges sociaux ou de direction effective respectifs sont situés dans différents pays, ce critère doit être apprécié selon les circonstances propres à chaque espèce, en tenant compte des liens entre les mandats sociaux exercés (BOFiP-IR-CHAMP-10-§ 230-31/01/2013).

 

  • Critère d’ordre économique => Les contribuables ont le centre de leurs intérêts économiques en France. Il s’agit du lieu où les contribuables ont effectué leurs principaux investissements, où ils possèdent le siège de leurs affaires, d’où ils administrent leurs biens. Ce peut être également le lieu où les contribuables ont le centre de leurs activités professionnelles ou d’où ils tirent, directement ou indirectement, la majeure partie de leurs revenus.

 

L’appréciation de ces critères se fait de façon alternative et non pas cumulative : si un seul d’entre eux est rempli, la domiciliation fiscale en France est établie.

Lorsqu’une convention internationale est invoquée, une jurisprudence de 2015 (https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000030556727&fastReqId=1859687816&fastPos=1)  est venue rappelée les règles d’interprétation :

Lorsque, une personne physique est un résident des deux États contractants, sa situation est réglée dans la plupart des traités de la manière suivante

Le choix du critère est successif

1) cette personne est considérée comme un résident seulement de l’État où elle dispose d’un foyer d’habitation permanent ;

2) si elle dispose d’un foyer d’habitation permanent dans les deux États, elle est considérée comme un résident seulement de l’État avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux)

3) si l’État où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d’un foyer d’habitation permanent dans aucun des États, elle est considérée comme un résident seulement de l’État où elle séjourne de façon habituelle ;

4) si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux États ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d’eux, elle est considérée comme un résident seulement de l’État dont elle possède la nationalité ;

5) si cette personne possède la nationalité des deux États ou si elle ne possède la nationalité d’aucun d’eux, les autorités compétentes des États contractants tranchent la question d’un commun accord

 

Depuis le 1er janvier 2017 et ce dans un contexte de nombreux scandales (HSBC Suisse, UBS, Panama Papers) l’administration fiscale française possède un arsenal juridique étendu dans ses moyens d’investigation :

  • l’audition de témoin fiscal (art.19 de la Loi de Finances rectificative) qui ne concernera pas le contribuable visé mais des tiers
  • la rémunération d’un aviseur fiscal qui est susceptible de révéler une situation de fraude fiscale internationale à la condition que les sommes dues soient recouvrées. Cette disposition qui existait avant 2003 est rétablie

 

Il en va sans dire que dans un monde où les activités économiques et les patrimoines se développent souvent dans plusieurs pays à la fois, une extrême vigilance doit être apportée à la fiscalité qui en découle.